Kazuo se dit qu'il comprenait enfin un peu mieux son frère. Enfin non, il ne comprendrait jamais Shizuo et son aveuglement incroyable sur les sentiments de Leiko, mais il comprenait au moins un peu son intérêt pour les filles. Même s'ils n'étaient pas vraiment attirés par le même genre de filles.
Celle-ci était mignonne. Et elle avait l'air nettement plus intelligente que les groupies qui tournaient autour du tombeur de la famille. Elle avait cette façon de le regarder, aussi. Comme si elle n'avait aucune idée de ce qu'elle faisait là et de pourquoi elle avait osé lever les yeux sur lui. C'était adorable.

Toujours est-il qu'ils se retrouvèrent deux à lire dans leur coin. Kazuo n'avait jamais été très bavard, c'est vrai, mais là, comme très rarement, il avait envie de discuter avec cette fille. Sauf qu'on ne dérange pas quelqu'un qui lit. C'était sa mentalité. Alors il se contenta de l'observer du coin de l'oeil en feignant d'être concentré dans son livre.
Il n'interrompit sa fausse lecture que pour lancer un regard désapprobateur à Shizuo, qui s'éloignait avec une fille aux cheveux roses. Leiko avait déjà quitté la salle, de toute façon. Il n'avait aucune idée d'où elle était allée. Enfin pour ce soir, il ne pouvait pas leur faire la leçon : ils n'avaient rien fait de grave pour le moment, et il n'était pas mieux de son côté.

Après tout, il se retrouvait dans une situation proche de celle que Shizuo vivait une dizaine de fois par semaine, si ce n'était plus. Etait-ce mal d'être attiré par cette fille ?

Elle se laissait faire. Moui, d'un autre côté, c'était prévisible, vu qu'il l'avait hypnotisée. Mais quand même. Ca l'amusait énormément de voir la facilité avec laquelle il pouvait manipuler quelqu'un. Il plaça sa main sous son menton pour l'empêcher de s'écarter, même si elle ne le ferait pas. Il sourit en sentant que ses mains descendaient sur son torse. Ce pouvoir avait vraiment des effets fascinants.
Puis il se passa quelque chose qu'il ne comprit pas et, quelque secondes plus tard, il heurtait un mur et s'écroulait. Ca faisait sacrément mal, quand même. Qu'est-ce que venait de se passer, au juste ? Où avait-elle tiré une telle force ? Parce que c'était elle qui l'avait repoussé, il y aurait mis sa main à couper. Super, il était tombé sur la seule humaine capable de résister à son pouvoir, et elle faisait de la télékinésie. Vraiment le plus gros coup de bol de sa vie.

Une odeur familière monta à ses narines. Du sang. Son sang, en fait. Mais comme il s'était remis à respirer, par réflexe, il sentit surtout celui de la jeune fille. Et il était blessé. L'effet était encore pire.

Il se redressa lentement et s'approcha d'elle. Sa main se referma sur son épaule pour le pousser contre l'arbre. Trop violemment. Il n'était plus lui-même. Il était blessé, même si ça ne durerait pas longtemps. Et sa gorge était si proche, son sang, la clef de sa guérison.

-Ca fait mal, tu sais ? lâcha-t-il d'une voix méconnaissable.

Foutu instinct vampirique. Il fallait qu'il reprenne le contrôle. Même s'ils étaient plus ou moins seuls, n'importe qui pouvait débarquer. Il ne pouvait pas...
Il réussit à s'écarter alors que ses dents effleuraient déjà la peau de la jeune fille. Il fallait qu'il se contrôle. C'était sûrement écrit quelque part dans les codes. Ouais, sûrement.

-Oh et puis merde.

Elle ne pourrait pas résister à son hypnose deux fois. En tout cas il l'espérait. Alors il le relança. Il avait toujours réussi à manipuler tout le monde, et il était encore moins qu'avant d'humeur à jouer. C'était plus une question de fierté. Elle avait eu un déclic, mais il avait juste à ne pas la brusquer et à ne pas lui faire peur.

-Désolé. Je ne sais pas ce qui m'a pris. Vraiment. Un coup de chance que je n'ai pas heurté le mur trop violemment.

Tu parles. Va dire ça au sang qui coulait dans son dos et qu'il sentait imbiber sa chemise. Génial. C'était vraiment sa soirée.

-Un contrecoup du choc, sans doute. Je m'en veux un peu. Je ne t'ai pas fait mal, au moins ?

Si elle résistait un peu à son hypnose, il fallait aider l'hypnose, pas vrai ? Alors soit, aidons l'hypnose. De toute façon, elle finirait dans son lit, d'une manière ou d'une autre. Et elle serait d'accord, bien sûr. Le viol n'entrait pas dans ses compétences. La manipulation mentale si.

Lire à un bal. Un concept pour le moins original. Au moins autant que de boire un thé aux sources chaudes, en fait. Disons qu'elle avait toujours eu sa propre vision de la normalité, et qu'elle s'accordait mal à celle des autres. Tant pis pour eux, ils n'avaient pas l'esprit assez ouvert.

Sauf celui qui se tenait à côté d'elle. Bon, en oubliant son coup de foudre, il lui ressemblait un peu, non ? Il lisait aussi au milieu d'un bal. Elle ne savait même pas qui était ce type et elle ne pourrait sûrement jamais le revoir. Elle l'oublierait vite, et il ne chercherait pas à lui reparler. Déjà qu'ils ne s'adressaient pas la parole, tous les deux plongés dans leur livre. Devait-elle lui demander son nom ? Interrompre sa lecture ?

Elle releva les yeux de son livre pour observer la foule. Les gens dansaient ou grignotaient au buffet. Un éclat de lumière dans un coin l'informa que Lyvii était revenue faire un tour près d'elle. Un clin d'oeil, et elle était près d'elle. Les yeux de Lyvii roulaient en direction de l'homme près d'elle. Oui, elle se demandait qui c'était, forcément. Mio haussa les épaules et se replongea dans sa lecture. Elle n'en avait pas la moindre idée et elle s'en fichait un peu.

Mais le bruit l'empêchait de se concentrer. En relevant les yeux de son livre, elle s'aperçut que lui non plus n'avait pas l'air concentré dans son livre. Il jeta un regard noir à un homme qui s'éloignait en la prenant par la taille, et elle détourna le regard. Bon, elle ne pouvait pas lire dans ces conditions. Que faire, alors ?

» Il y a un endroit moins bruyant, vous croyez ?

Quelque chose n'allait pas. Déjà, il tenait encore debout _ pas que ce soit une mauvaise nouvelle, c'était même plutôt réconfortant de ne pas l'avoir tué, mais ce n'était pas vraiment normal. Après la chute qu'il venait de faire, n'importe quel être humain normal serait resté sonné un moment. Oui... N'importe quel être humain. Elle frémit mais s'efforça de faire bonne figure. Enfin jusqu'à ce qu'il la plaque contre un arbre et ne lui broie l'épaule. Bordel, qu'est-ce qu'il foutait ?
Sa bouche était trop près de sa gorge... Trop près...

C'était un vampire. Elle eut à peine le temps d'arriver à cette constatation qu'elle l'avait déjà oublié. Il était si... fascinant. Ça ne pouvait pas être dangereux, si ? Elle savait se défendre, elle ne risquait rien.

Bon... Elle pouvait bien lui faire confiance un peu. En fait, elle ne voyait pas pourquoi elle ne lui ferait pas confiance. Il s'était excusé, et puis elle l'avait quand même envoyé valdinguer contre un mur. Pourquoi avait-elle fait une chose pareille ? Comment avait-elle pu ne serait-ce que songer à faire du mal à un homme comme lui ? Il était si... si... Elle ne trouvait pas les mots.

Et, du coin de l'oeil, elle remarqua qu'il saignait. Qu'il saignait même beaucoup.

-Votre chemise... elle... elle est imbibée de sang. Vous devez nettoyer ça.. Je..

Si quelqu'un voyait ça, elle était bonne pour la tôle. Blesser le fils d'un riche entrepreneur n'était pas une bonne manière de soigner sa couverture.

-Il faut qu'on nettoie ça.

Elle le prit par le bras en espérant que les gens seraient trop occupés à danser pour regarder la chemise rouge sang de Shizuo. Elle le traînant jusqu'au bac accolés aux douches des vestiaires et tendit la main.

-Donnez-la moi, je vais retirez le sang.

Elle était encore assez lucide pour ne pas songer à lui enlever elle-même.

Bon, tout allait bien. Il avait réussi à s'empêcher de la vider de son sang ici, ce qui aurait fait mauvais genre au bal de son père, et elle semblait plus ou moins retombée sous le charme. Tant mieux. Il aurait détesté devoir renoncer et trouver une autre cible alors que pas mal de monde l'avait déjà vu avec elle. C'était plus difficile de draguer quelqu'un quand on s'était éclipsé avec quelqu'un d'autre un peu plus tôt.

Nettoyer le sang ? Avec plaisir. Surtout si ça impliquait de retirer sa chemise. Un léger sourire étira ses lèvres. Voilà, elle était de nouveau sous son charme, et elle le traînait derrière lui avec une précipitation presque émouvante.
Même si elle ne lui enleva pas sa chemise elle même. Quel dommage.

Il l'enleva sans précipitation _ elle avait coûté une fortune à son père et il allait sûrement le tuer en voyant qu'elle était foutue, ou essayer, au moins _ et il la lui tendit. En attendant qu'elle la lave, comme si elle avait essuyé du sang toute sa vie, il s'adossa à un mur et perdit son regard dans le vague. Si elle pouvait sauver sa chemise, ça serait nickel. Ensuite il pourrait reprendre son petit jeu de séduction. Enfin... le sang ne partait pas facilement sur une chemise blanche.

Il se glissa derrière elle et l'entoura de ses bras.

-Laisse-la tremper un peu, le sang va finir par partir. On a mieux à faire en attendant qu'elle soit propre, non ?

Il passa ses lèvres sur le haut de son oreille.

Bon, il avait enlevé sa chemise, et maintenant il lui fallait une volonté de fer pour détourner les yeux. Surtout qu'il l'avait enlevé si lentement que ça ressemblait presque à un striptease. Cette simple pensée la fit rougir et lui donna la force mentale de détourner les yeux. Elle prit la chemise sans faire de commentaire et boucha le lavabo pour la laisser tremper quelques instants. Elle allait attraper une brosse pour frotter le sang lorsqu'elle sentit des bras passer autour d'elle. Elle se figea, et son coeur sembla s'arrêter de battre.

Il était trop près d'elle. Comme tout à l'heure. Elle ne remarqua même pas que son coeur ne battait pas, tant le sien était irrégulier. Oui, le sang partirait mieux si la chemise trempait longtemps. Elle était bien placée pour le savoir. Mais elle n'était pas sûre de comprendre de quoi il parlait. Enfin si, elle comprenait, et c'est bien ça qui la dérangeait : ça la tentait, ce qui était la pire insulte qu'elle puisse faire à ses principes. Elle ne pouvait pas faire ça.

Les lèvres qui caressèrent son oreille lui tirent quand même un soupir. Elle n'était pas dans son état normal. Cet homme l'attirait trop, et elle savait qu'il y avait quelque chose qui clochait, mais son cerveau avait décidé de faire attraction. A travers le tissu trop fin de sa robe, elle pouvait sentir sa peau, son torse qui se soulevait légèrement au rythme d'une respiration étrange, presque pas naturelle. Elle parvint à peine à bafouiller quelque chose d'incompréhensible et d'inintelligible. Il ne fallait pas qu'elle bouge. Elle ferma les yeux et essaya de reprendre le contrôle, mais ça eut pour seule effet de la rendre encore plus sensible à la présence de Shizuo. Mauvaise idée.

Finalement, elle finit par se retourner et, sans qu'elle le veuille vraiment, elle prit son visage dans ses mains pour l'attirer vers elle et l'embrasser. Même si une alarme clignotait dans sa tête en lui disant que c'était mal, et dangereux. Elle n'arrivait pas à franchir la barrière de l'hypnose.

Un endroit plus tranquille. Voilà qui correspondait mieux à ses plans pour la soirée. Son sourire n'avait plus rien de gentil. Plus carnassier. Un sourire de femme qui n'a plus grand chose à attendre de l'homme en face d'elle. Mais c'était un autre homme qui occupait ses pensées. Et elle détestait ça. Bien, Shizuo s'amusait ? Elle ferait pareil. Y a pas de raison.
Elle ne savait pas qui était cette fille aux cheveux roses, mais elle ne l'aimait déjà pas. Et il fallait vraiment qu'elle fasse taire cette stupide jalousie.

Kaelia prit la main de cet homme dont elle avait oublié le nom. Mih, ou quelque chose du genre. Elle l'entraîna dans un coin plus dissimulé du gymnase, sans doute un ancien vestiaire que les organisateurs de la soirée n'avaient pas pris soin de relooker pour l'occasion. Ca ferait l'affaire. Non, le couloir qui y menait ferait l'affaire. Elle se jeta presque au cou de cet homme. Telle était sa vie. Tant que Shizuo la voyait...
Ne pas penser à Shizuo. Ne pas penser à Shizuo. S'amuser. Profiter de cette courte période sans timidité. Mais surtout, surtout, ne pas penser à Shizuo. Sinon elle ne répondait plus de rien, et elle n'était pas sûre qu'il reste quelque chose de son partenaire à la fin de la soirée. Elle avait des tendances veuve noire quand elle était énervée, et cette nana aux cheveux roses l'énervait. Même si elle ne devait pas penser à Shizuo.

[Je sais que Mih n'est plus un joueur du forum, mais je garde le fil des événements pour Kaelia. Au moins un peu.]

Eh bien, ça avait l'air de marcher. Shizuo entendait son coeur battre à un rythme fou, ce qui entrait encore plus en contradiction avec le sien, immobile depuis quelques années. Il se força à respirer, même s'il en avait depuis longtemps perdu l'habitude. Il ne fallait pas lui donner une raison de plus de se méfier. Si elle ne l'entendait pas respirer, elle risquait de se poser des questions, et il n'était pas sûr que l'hypnose y résiste.

Il ne comprit pas ce qu'elle dit mais, dès qu'elle se retourna pour l'embrasser, il l'entoura de ses bras et la colla un peu plus contre lui. Elle était encore sous le charme. Au moins, il n'avait pas eu à prendre l'initiative lui-même, ce qui ne faisait plus de lui le dragueur dans l'histoire. Même s'il l'avait un peu poussée, quand même. Il l'embrassa avec plus de passion, l'attirant vers un mur sans même réaliser et jouant avec les bords de sa robe. Personne ne viendrait ici.. Personne n'était venu assister à son combat avec Izumi, après tout, alors pourquoi viendrait-on le déranger ?

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